Le procès. Trois condamnés assommés de fatigue. Je vois le beau-père de dos, il y a ma sœur, c’est sa fille après tout, je la regarde elle baisse les yeux.
Le beau père vient vers moi et me tend la main. Je le regarde dans les yeux, je serre les dents, je ne prends pas sa main. Il la retire.
L’attente. Assis par terre la lumière est chaude mais il fait froid.
Ça fait longtemps que tu es seul me dit un des jurés. Le jugement va commencer. Je suis aussi coupable que lui. Au fond de toi tu ne veux pas de tout ça. Mais c’est un devoir, qu’est-ce que le devoir au juste ? On doit quoi et à qui ?
Un soubresaut, je m’enfuis, dédale de couloirs dans l’ombre, ça ressemble à une vieille école londonienne du Strand, je me repère, je connais les lieux, des enfilades d’amphithéâtres. Gravir les marches, puis les dévaler. Je suis nu et libre, il n’y a personne mais je sens une présence qui me suit. Un ghost runner, son souffle est plus régulier que le mien, plus jeune, plus athlétique. Il me rattrape.
Derrière une porte, une conférence sur la lumière. Nous nous arrêtons pour écouter. Mais le lecturer nous demande de partir. — C’est une conférence privée sur réservation, nous dit-il.
Le jogger me sourit, il semble amical.
— Je connais un autre chemin pour sortir à l’air libre. Je le suit mais il court trop vite, ne m’attend pas. Me révèle ma lourdeur terrestre et ma fatigue physique. Je me perds à nouveau, il fait de plus en plus sombre, je loupe une marche, me fais une entorse. Je me relève, je boite, je sors enfin à l’air libre. Je suis en altitude quelque part en montagne. Des nuages se rapprochent vite, m’enveloppent et m’emportent loin.
